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11 décembre 2013 3 11 /12 /décembre /2013 21:27

Après le 5ème cross du challenge, le calendrier propose à de nombreux membres du RCS le trail de Montigny le 22 décembre. Pour contribuer à la préparation mentale de nos troupes, je vous propose ce conte à dormir coureur en vous souhaitant une bonne course. Certains événements relèvent de l'histoire, d'autres moins ! Je vous laisse le soin de séparer le bon grain de l'ivraie.

                                    J-F

 

Quand Romy rencontre Sissi.

 

Ne dit-on pas : " Ce que Femme veut, Dieu le veut" ?

 

Albert était Traileur, Sa femme, Huguette, jamais à l’heure, marcheuse.

 

Alors qu’il numérotait ses abattis meurtris par moult chutes, dont la dernière lors de l'épreuve de Préaux quinze jours auparavant et qu’il faisait part à sa compagne de douleurs persistantes dans le dos et surtout aux côtes qui avaient malencontreusement percuté une ornière, savez-vous ce qu'elle lui répondit ?

- ça tombe bien, demain il y a le trail des hautes falaises, j'ai envie d'une randonnée sur la côte, inscris toi.

La distance s'élevant à 30 kilomètres agrémentés de mille soixante cinq mètres de dénivelé positif, l'entrée dans sa soixantième année qu’il venait de fêter lui parut soudain périlleuse et l'outrage des ans sur son squelette un fardeau bien lourd à porter.

Devant sa moue dubitative elle eut alors cette parole qui restera historique dans leur histoire personnelle :

"Chouchou, s'il te plaît ..." accompagnée d'un regard de circonstance qui ferait passer le chat potté de Shrek pour un séducteur de pacotille.

Évidemment, il céda.

Le lendemain matin ils partirent donc pour Sassetot tôt, très tôt, trop tôt pour un dimanche.

Sassetot le Mauconduit pour être précis, dénommé ainsi prétend-t-on en Normandie car ses villageois auraient convoité le clocher de Sassetot le Malgardé, village voisin et l'auraient volé !

Ainsi les uns l'auraient mal gardé alors que les autres se seraient mal conduits !

Notre couple de sportifs voulut juger sur pièce mais fit chou blanc car le sassetotais se taît.

Et si le sassetotais se taît, comment voulez-vous que la sassetotaise ne se taise pas qu'elle soit sotte ou non !

Plus exactement, nos deux visiteurs constatèrent que la gent locale ne parlait que de ce qui lui plaisait.

De l'impératrice Sissi par exemple, ça oui !

Elle fut sassetotaise durant deux mois en 1875 dans le château qu'elle loua à son propriétaire de l'époque, un riche armateur du nom de Perquer.

Porque ?

Parce qu'il fallait à sa petite fille, l'archiduchesse Marie Valérie, à la santé fragile,un séjour au bord de la mer la plus iodée : La Manche.

Mince !

Son intendant lui sortit Mauconduit de la sienne.

 

Pour leur part, nos deux visiteurs se garèrent.

Le caravansétrail avait posé le parking de la course à proximité du château.

 

- Je ne sais pas si la chose a été efficace pour la petite (Marie Valérie avait sept ans), souffla Huguette à l'oreille poilue d’Albert lorsqu’ils le surent, informés par une Sassetotaise balaise, mais toi, le fragile, changer d'atmosphère va t'aérer les neurones !

 

- Atmosphère, atmosphère, est-ce que j'ai une gueule d'atmosphère ? répondit-il, paraphrasant Arletty (dont il était fan) dans Hôtel du Nord, bien qu'en l'occurrence c'est sa compagne qui empruntait la voix de la vedette et lui dictait la voie à suivre !

 

Mais revenons au trail puisque, à force de questionner et d'humer l'iode pour devenir intelligent, le temps avait passé et le départ allait être donné.

Les concurrents du dix et ceux du trente partaient ensemble. Le début de parcours n'allait pas laisser les coureurs sur leur faim puisqu'il les obligeait à descendre sur les plages des Petites Dalles et des Grandes Dalles puis à en remonter, de quoi satisfaire tous les appétits !

Les neurones d’Albert iodés un max, because le vent qui soufflait fort, fonctionnaient à merveille, ses gambettes, un peu moins.

Arrivé sur les galets des Petites Dalles, sans comprendre ce qui était à l'origine de ce mirage, notre ami crut apercevoir l'impératrice. C'est en effet là qu'elle prit les 32 bains qu'on lui attribue entre le 31 juillet et le 25 septembre 1875.

- Sissi ! S‘écria-t-il.

- Non, non ! lui répondit un concurrent.

Il en fut terriblement déçu.

Peut-on être si terre à trail ?

L'épreuve longeait ensuite la côte, Albert sentait terriblement les siennes endolories sur des chemins peu carrossables et face à un vent de tous les diables.

Dieu merci, tout corps normalement constitué, plongé dans l'effort suffisamment longtemps, se met à produire de l'endorphine.

La sienne, bonne copine, la joua fine pour endormir quelque peu la douleur.

Alors que la course quittait la côte pour remonter vers l'intérieur, il aperçut un yacht.

Il aurait juré qu'il s'agissait de celui qui accompagnait la monarque lors de ses bains.

Son pilote l'avait sauvée, rapporte-t-on, alors que Sissi avait été surprise par les courants.

Albert s’imagina en sauveur, dans un superbe costume blanc, sous une casquette de marin du plus bel effet. C’est peut-être pourquoi il lança tout fort à l'attention des occupants du bateau :

- Attention aux courants, Sissiiii...

- Non, noooon... Reprit une voix derrière lui !

- Albert n'en croyait pas ses oreilles ! Jusqu'où cet énergumène allait-il le suivre, de quoi se mêlait-il ?

Un rustre assurément ou un jaloux. Voilà, un jaloux !

Il aura remarqué que, tout à l'heure, aux Petite Dalles, la baigneuse n'avait pas été indifférente à son appel.

 

La remontée effectuée, le retour entamé, après avoir passé Clainville, chemins et routes traversaient des champs. Au loin, une cavalière galopait à bride abattue. Elle s'approchait du serpent de coureurs dont l'allure comparée à celle du superbe étalon évoquait le déplacement de baudets fatigués.

Le vingtième kilomètre était franchi. Beaucoup de voyageurs qui ont croisé ce village vous le diront, pénétrer Clainville vous laisse en proie dans les instants qui suivent à un vil clin d'oeil du destin. Exception qui confirme la règle, le sien fut divin.

Cette cavalière qui surgissait au galop, c'était elle. Son nom elle le signe du bout de son ombrelle d'un S qui veut dire Sissi !

Ah, Sissi, Sissi, Sissi ! Séduisante tu l'es à chaque fois.

Conquis, ne se sentant plus de joie,

Albert ouvrit un large bec et cria :

- Sissi, c'est moi !

puis anticipant sur la réponse du concurrent obstiné qui le suivait, il se retourna pour lui lancer, l'air mauvais :

- Et vous, gardez vos Non, nooon ...

Le dernier non baissa d'intensité lorsqu’il se rendit compte à sa grande confusion que l’athlète qui le suivait n‘était plus le même.

Il se répandit en plates excuses qui ne convainquirent pas le quidam qui venait en fait de le rejoindre et, plus rapide, s'apprêtait à le dépasser.

Ce qu'il finit par réaliser en lui jetant au passage, le regard torve :

- Encore un compétiteur à la langue bien pendue mais à l'allure irrégulière.

Sans plus s'occuper de lui, Albert se retourna du côté de sa cavalière qui lui fit signe et repartit ventre à terre.

C'est au moment ou, fou de joie, il se disait que Sissi l'avait salué, que l'affreux dilemme naquit dans son esprit.

Il réalisa que celle qu’il avait vu arriver présentait les traits de Sissi, mais que celle qui l'avait gratifié du signe de la main peu après montrait le visage de l’actrice qui l'avait incarnée sur le grand écran, Romy Schneider!

SA Romyiii, SA vedette culte !

Laquelle affectionnait-il le plus des deux ?

Incapable de se prononcer, il mit sa décision en délibéré entre ses deux cuisses.

ah, non, non, non, trois fois non,

Arrêtons là illico les idées salasses qui réjouissent déjà certains lecteurs.

Rien d'indécent à cela, ce n'est pas le genre de la maison.

Il confia simplement à sa cuisse droite le rôle de Sissi, les royalistes sont bien à droite n'est-ce pas ? Alors que sa cuisse gauche endossait, elle, le rôle de Romy.

Celle qui pousserait le plus fort montrerait vers quel côté pencherait le plus son coeur.

Et là mes amis, son allure prit une vitesse inattendue.

Ni l'une, ni l'autre de ses jambes ne voulut céder.

Chaque accélération de Sissi avait pour réponse une poussée plus puissante de Romy.

Il se mit à doubler des concurrents.

Albert était dans un état proche de l‘asphyxie et de l’Ohio réunis.

Son souffle, non sensibilisé au dilemme maudissait le cinéma et la noblesse.

Notre homme avait l'impression que ses cuisses étaient les pistons d'une locomotive à vapeur qui vrombissait :

Romy-Sissi, Romy-Sissi, Romy-Sissi, tchou chou !..

Les coureurs s'écartaient en entendant arriver son équipage.

On jouait un remake du train et l’on murmurait sur son passage : Voyez le beau train tignant.

L'arrivée approchait, le cœur d’Albert bien qu’emballé ne pouvait se prononcer ni pour l‘une, ni pour l’autre. Quant à Huguette …

Aux calendes grecques !

Lorsque la loco arriva en gare, le débat restait entier mais il fut mis sous l'éteignoir par un événement inattendu.

Deux gendarmes attendaient.

A peine Albert avait-il repris son souffle qu'ils vinrent l'interpeller. Derrière eux, l'air revanchard, le concurrent à qui il avait voulu adresser la parole un peu plus tôt et qui était arrivé visiblement bien avant lui souriait ironiquement.

- Une personne du nom d'Heurtefaux vous a signalé comme étant un concurrent en situation irrégulière, vos papiers s'il vous plaît. Lui asséna le plus gradé des deux.

Albert les emmena à sa voiture, suivi du délateur qui ne voulait rien rater du spectacle.

Ses papiers en règle provoquèrent des réactions de dépit chez les représentants de la maréchaussée passablement contrariés et une réflexion du chef à son subalterne:

- Du chiffre, Gaston, du Chiffre ! Qui laissait entendre qu'ils ne voulaient sans doute pas rentrer bredouilles.

Le sous-fifre, l'air supérieur, prit alors un ton condescendant pour poser à Albert la question suivante :

- Vous prétendez avoir vu l'impératrice Sissi ?

A son grand dam, Albert dut à son tour répondre, tel son concurrent jaloux l’avait fait à son égard un moment auparavant :

- Non, non.

Celui-ci ne se priva point de persifler aussitôt le regard suffisant :

- Je vous l’avais dit qu’il n’avouerait pas !

Histoire d’avoir le dernier mot, Albert rajouta quand même avant qu'ils ne quittent la place :

- Je n’l’ai point vue mais savez-vous ?

- Les grandes dames ne meurent jamais !

 

Publié par Jean François JOLY - dans Contes à dormir coureur

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